Albert Ball est né le 14 août 1896. Il
étudie à Grantham et Trent College. Chez lui, à Nottingham, il transforme le
court de tennis familial en stand de tir et il excelle au pistolet; il bricole aussi de nombreux
moteurs et appareils radio dans son atelier installé à l'intérieur d'une
vieille cabane derrière la maison et à l'âge de dix-sept ans, il dirige une
petite fonderie de cuivre et un atelier électriques.
Lorsque la guerre éclate,
il s'engage au sein du bataillon des fusiliers de Sherwood. Il paye son écolage
de pilote au célèbre aérodrome de Hendon avec ses propres deniers avant
d'obtenir son transfert au Royal Flying Corps en octobre 1915 à dix-neuf ans.
Albert fait tout d'abord ses gammes à bord de biplaces BE2c avec le Squadron
13, une escadrille de reconnaissance, avant de se présenter au Squadron 11 au
moment de la préparation de l'offensive dans la Somme.
La première fois qu'il
utilise la mitrailleuse de son Bristol Scout au mois de mai, il manque bien d'y
laisser la peau : par la suite du mauvais fonctionnement du synchroniseur, ses
balles coupent presque son hélice en deux. Le 22 mai, il obtient ses deux
premières victoires, mais seulement la première lui est créditée.
Il passe
ensuite sur Nieuport 17 et, en trois mois, réalise ce qu'aucun
pilote avant lui n'avait réussi, abattant 30 avions allemands entre le début
juillet et la fin septembre; il distance ainsi Boelcke et Guynemer par le nombre des victoires et, pendant un certain
temps, détient le record des deux camps. Ses exploits lui valent la Military Cross et l'adulation des Britanniques qui, jusqu'alors, n'avaient pas
fait preuve de grand enthousiasme pour leurs pilotes.
Ses
méthodes d'attaques combinent celles de Guynemer et de Hawk assorties de
quelques manoeuvres bien personnelles. Il se comporte en individualiste
farouche qui déteste voler en formation et s'en détache souvent pour livrer ses
propres combats.
Ball entretient avec un soin jaloux son avion et sa
mitrailleuse Lewis dont il ne cesse de régler l'affût, support incurvé qui
permet de faire basculer l'arme pour recharger ou tirer vers le haut. Il a fait
modifier les commandes de vol de manière à pouvoir, pendant les secondes
cruciales de l'engagement, garder les mains libres pour tirer
Albert Ball dans le cockpit de son S.E.5a
Il est le
premier à fixer un miroir sue le plan supérieur de son appareil afin de
surveiller ses arrières sans avoir à tourner la tête, dispositif qui sera
adopté ensuite par de nombreux pilotes alliés et allemands. Son agressivité lui
vaut bon nombre d'ennuis et il sera abattu une demi-douzaine de fois, dont une
à la fin du mois d'août 1916.
Ce jour-là, il part seul sur son Nieuport défier
les chasseurs allemands basés à Cambrai; quelques uns décollent pour
l'intercepter mais il pique au milieu d'eux, les dispersent dans tous les sens
et il réussit à en descendre deux. Cependant, les autres reviennent en force,
le prennent sous leurs feux croisés et mettent son moteur hors d'usage; à coursde munitions, Albert vide le chargeur de son pistolet sur ses ennemis avant dCurieusement,
les succès de Ball semblent le mettre mal à l'aise dans ses rapports avec ses
camarades d'escadrille. Il ne loge pas avec eux et vit seul dans une baraque en
bois située derrière le hangar le plus écarté du terrain, qu'il appelle sa
"chère vieille cabane".
Entre deux missions, il travaille
pendant des heures dans le petit jardin potager qu'il a aménagé près de son
logis, où il fait pousser des légumes.
C'est un garçon renfermé et profondément
sensible. Un jour, il déclare que les aviateurs allemands sont "des
braves types qui font de leur mieux" et que rien ne le met au
désespoir comme "de les voir s'écraser au sol". Mais, à une
autre occasion, il relate avec délectation comment il avait mitraillé un avion
désemparé "afin de s'assurer d'avoir bien eu les passagers".ese dégager et de regagner en vol plané ses lignes où il se pose en catastrophe.
Albert Ball, devant son Nieuport 11.
A
la fin du mois de septembre, ces changements d'humeur se traduisent par la
fatigue du pilote. Ball se rendant compte que quelque chose n'allait pas,
demande à son chef d'escadrille de lui accorder une permission. Quelques jours
plus tard, il apprend qu'il est nommé Capitaine. Puis il s'en va recevoir en
Angleterre le Distinguished Service Order, des mains du roi George V.
L'as britannique revient sur le front à la mi-avril 1917 pour
prendre le commandement du Squadron 56. Il proteste quand on lui attribue un
nouveau biplan S.E.5 bien que son moteur et ses deux mitrailleuses en font un
appareil plus apte à affronter les Albatros que son Nieuport. Il persiste à
voler seul et à ne rentrer qu'à court de carburant ou de munitions - habitudes
héroïques de la belle époque de 1916, mais suicidaire devant les Jastas
attaquant en formation disciplinées.
Nieuport 17, « A213 », piloté par le Captain
Albert Ball, été 1916
Il n'a cependant rien perdu de sa maestria
et a inscrit à son tableau de chasse 15 avions allemands supplémentaires
lorsque, le 7 mai, il tombe avec la patrouille qu'il conduit, à bord d'un S.E.5, sur
une formation de la Jasta 11 que commande Lothar von Richthofen. Dans la mêlée qui s'en suit, chacun des deux as se trouve aux
prises avec un adversaire différent. Celui de Lothar pilote un triplan Sopwith,
un des appareils les plus performants livrés aux Britanniques en ce printemps.
Mais l'anglais et l'allemand doivent se séparer sans être arrivé à des
résultats concluants.
Au même moment Ball attaque un Albatros
D.III qui rompt le
combat. Finalement à cause du manque de visibilité, le temps était exécrable,
Albert et Lothar se touche accidentellement. Lothar von Richthofen, au bord de
l'évanouissement parvient à se poser et s'en tirer avec une blessure à la
hanche. Albert Ball a eut moins de chance : il percute le sol à Annoeullin,
près de Lille et, quand on le sort des débris de son appareil, il expire dans
les bras d'une jeune fermière à l'âge de 21 ans.
L'Angleterre lui décernera à
titre posthume la Victoria cross. Pour son total de 47 victoires obtenues
lors des 23 semaines passées sur le front et au cour de ses 150 missions de
combats. Mais plus que la comptabilité, on retient surtout d'Albert Ball sa loyauté
chevaleresque à l'égard de l'adversaire. A Annoeullin, on se souvient encore
aujourd'hui du glorieux gamin de Nottingham, le collège de localité porte, en
effet, son nom.'a