Le colonel René Challe est né le 6 juin 1913 à
Besançon dans le Doubs. Ancien élève de Saint-Cyr,
promotion "Maréchal Lyautey" (1935-1937), prévu
pour le 5e régiment de tirailleurs marocains, il choisit l'Armée
de l'air et, le 1er octobre 1937 il est admis comme stagiaire au centre
école de Versailles.
Hasard du calendrier ou choix délibéré
? Le jour de son vingt-cinquième anniversaire, le sous-lieutenant
René Challe est breveté pilote. Il reçoit quelques
mois plus tard son affectation pour le groupe
de chasse III/7. A la déclaration de guerre, le lieutenant
Challe est adjoint au commandant de la 5e escadrille.
Le 9 mai 1940, il est gratifié d'une victoire probable sur
un Heinkel 111. Son premier avion officiellement abattu faillit lui
coûter la vie. Le 15 mai 1940, prenant en chasse une colonne
de Dornier 17, il parvient dans cette impressionnante mêlée,
à en descendre un.
Aussitôt l'étau se resserre
sur son Morane 406. Ne pouvant faire face à la horde ennemie,
le lieutenant Challe est grièvement touché d'une balle
qui se loge en plein dans son poumon droit. Son avion en feu, il réussit
à s'extraire de la carlingue. Tombé à proximité
d'une formation d'artillerie, il est évacué sur l'hôpital
de Bar-le-Duc d'où il assiste à l'effondrement de l'armée
française.
Démobilisé en novembre 1942, il est résolu à
quitter le sol national pour reprendre la lutte aux côtés
de ceux qui de jour en jour essaient de faire reculer les armées
allemandes.
C'est par l'Espagne qu'en compagnie de son frère
Maurice, il s'évade le 11 août
1943. Emprisonné par les franquistes, il est remis aux autorités
françaises de Casablanca en décembre 1943 et se porte
volontaire pour le "Normandie".
Pourquoi s'engage-t-il dans cette unité ? Parmi les pilotes
du "Normandie-Niémen"
se trouvaient de nombreux chasseurs de la campagne 1939-1940. Beaucoup
avaient une note à régler avec la Luftwaffe dont ils
avaient dû subir la supériorité technique; d'autres
avaient à prendre leur revanche contre le sort qui, pour diverses
raisons, les avaient tenus éloignés des combats.
Pour
tous, l'offre du commandement soviétique de confier les meilleurs
de ses appareils à des pilotes français, au sein d'une
unité française, était, en même temps que
la chance de combattre efficacement l'Allemagne, une magnifique occasion
de prendre cette revanche "(1).
C'est dans cet état d'esprit que, le 18 mars 1944 il arrive
à Toula. Accueilli chaleureusement par les anciens, il commence
son entraînement sur Yak-9. Il mène son premier combat
en terre soviétique le 26 juin 1944 et a l'opportunité
d'abattre un Me 109.
Mais, incontestablement c'est le mois d'octobre
qui offre au capitaine Challe les moyens d'étancher sa soif
de revanche. En douze jours, du 10 au 22 octobre 1944 il accroche
trois Fw 190 et deux Me 109 à son palmarès. Le 16 décembre
1944, il quitte le commandement de la quatrième escadrille
pour celui de la première.
C'est en cette qualité qu'il
effectue, le 17 janvier 1945, sa dernière mission de guerre
en U.R.S.S. Cette ultime victoire lui coute aussi cher que son premier
succès aérien. A nouveau en position d'infériorité
numérique, il est descendu par un Fw 190.
Grièvement
touché au bras gauche, il parvient néanmoins à
rejoindre ses lignes et à poser son appareil à quelques
mètres de son PC. Il lui faut rassembler toute son énergie
pour s'opposer à l'amputation que semble juger inévitable
le chirurgien qui l'a pris en charge.
A la Libération, le commandant Challe est affecté à
la présidence du gouvernement provisoire de la République
Française. Du 6 Janvier au 1er août 1947, il commande
le groupe de chasse I/5 Champagne
devenu II/3 Champagne. Détaché, en novembre 1947 à
l'état-major du contre-amiral commandant la division Porte-Avions
à Hyères, il occupe le poste d'officier de liaison.
Pendant une année, de novembre 1949 à novembre 1950,
il suit les cours du Centre d'enseignement supérieur aérien
puis de l'Ecole supérieure de guerre aérienne. Il entame
à sa sortie, une carrière en état-major qui le
conduit successivement aux 3e et 4e bureaux.
Promu lieutenant-colonel en avril 1951, il est nommé en septembre
de la même année à l'état-major particulier
de monsieur Pierre Morel, secrétaire d'Etat à l'Air.
En octobre 1954, il prend le commandement de la base aérienne
d'Oran-la-Sénia.
Colonel le 1er octobre 1955, il retrouve le
Centre d'enseignement supérieur aérien en septembre
1957 qu'il quitte cinq mois plus tard pour la division "Plans
and Policy" du commandement suprême des Forces alliées
en Europe.
Stagiaire à l'Institut des hautes études de la défense
nationale et au Centre des hautes études militaires, le 29
août 1960 il est affecté à l'inspection générale
de l'Armée de l'air.
Le 1er juillet 1964, le colonel René Challe est admis à
faire valoir ses droits à la retraite, et quitte ainsi une
armée qu'il servit avec ardeur et passion.