Les
41
victoires de Madon le place parmi les
as supérieurs reconnus de la Grande
Guerre. Officieusement, Madon a été crédité
de 64 victoires probables, pour un
total théorique de 105!
Ayant
appris à voler en 1911, Madon est entré
à l'armée l'année suivante et a obtenu son
brevet en janvier 1913. Madon était un des
aviateurs militaires français les plus expérimentés
quand la guerre a commencé.
Assigné
à la MF.218, alors sergent, Madon a demandé
d'être pilote de chasse et en 1916,
il a rejoint la N.38. Il a remporté
sa première victoire et à la fin de
l'année en avait quatre et a été promu adjudant-major.
Madon
était WIA le 2 juillet avec 12 victoires
à son crédit et a été promu lieutenant
en février 1918. À la fin de l'année 17
il avait 19 victoiresà son actif. Il
a quitté la N.38 en mars 1918 quand
son score s'est élevé à 25. Il a alors dirigé
l'escadrille qui a été équipée de SPADS.
Le meilleur mois de Madon était juin 1918
où il a revendiqué huit avions. Son 41e
succès et dernier est venu le 3 septembre.
Six
ans plus tard, Madon s'est tué à Tunis
en volant pour l'hommage rendu à
Roland Garros. Il avait 32 ans.
Le 16 juillet 1918, trois Pfalz d'une escadrille de chasse allemande patrouillent en formation triangulaire dans le ciel de Reims. Soudain, l'attention d'un des ailiers est attirée par un reflet. Un chasseur français, dans le soleil, s'apprête à les attaquer. En manoeuvrait pour avertir les autres et se mettre en position d'attaque, l'ailier heurte un coéquipier.
Les deux appareils, enchevêtrés, piquent vers le sol. Le troisième croit assurer son salut par une montée rapide; hélas ! ses manoeuvras sont tellement brutales que l'avion casse. Le pilote français n'a pas tiré une seule cartouche. Pour faire bonne mesure, il abat un biplace allemand au-dessus de la Main de Massiges en rentrant au terrain.
Ses trois premières victimes, tombées près de Gueux, seront homologuées sans difficult bien que l'exploit soit inouï. Le bénéficiaire, le lieutenant Madon, n'en est pas autrement fier, car son palmarès dépasse déjà trente-cinq succès homologués, auxquels il faut ajouter près de soixante probables.
Avec quarante et une victoires sûres et soixante-quatre non homologuées, il terminera la guerre au quatrième rang de la liste officielles des as. Il trouvera la mort le 11 novembre 1924 à Bizerte, lors de l'inauguration du monument élevé à la mémoire de Roland Garros : n'ayant pu sortir d'un looping, il s'écrase sur un bâtiment pour éviter la foule.
Né en 1892 à Bizerte, Georges Madon fait ses études au collège de Tunis et, en voyant les premiers avions évoluer dans le ciel de Tunisie, il se sent rapidement attiré par ce nouveau sport. C'est à l'école d'Étampes, où il est venu s'entraîner, qu'il reçoit son brevet le 7 juin 1911, à l'âge de dix-neuf ans.
S'étant engagé au 1er régiment du génie en mars 1912, il est détaché dans l'aviation à partir du er janvier 1913. En juin, il participe avec les lieutenants de Malherbe et Munch à l'inauguration du terrain de Saintes. Au retour, son avion ayant été retourné par une rafale de vent dans un orage, Madon parvient à le remettre en ligne de vol (à l'époque, le vol sur le dos entraînait presque toujours la chute de l'appareil) et à atterrir sans
dommage sous une arche du viaduc de la Creuse.
Plus tard, il bat le record d'altitude avec un passager, en montant à 3 800 m. Nommé caporal le 12 juillet, il rejoint l'escadrille BI.10, basée à Belfort. Mais sa virtuosité le pousse a effectuer des acrobaties, qui seront sanctionnées par cinq mois de mise à pied et le renvoi en école à Avord, où, comble de la disgrâce, il assure les fonctions de caporal d'ordinaire !
A la déclaration de guerre, il doit attendre qu'un camarade se blesse lors d'un départ en reconnaissance pour pouvoir le remplacer et entrer en escadrille. La qualité des renseignements qu'il rapporte lui valent d'obtenir sa première citation, le 10 août. Il est ensuite affecté à la B1.30, stationnée dans le secteur de Soissons et chargée de réglages d'artillerie, de missions de reconnaissance, mais aussi de bombardements nocturnes : Madon
sera d'ailleurs l'un des premiers pilotes à voler de nuit.
Le 30 octobre 1914, alors qu'il effectue une reconnaissance au-dessus du Chemin des Dames à 2 000 m d'altitude, son appareil est touché par un obus de DCA de 77 mm, qui lui fauche son moteur. Se trouvant assez loin à l'intérieur des lignes allemandes, Madon décide de tenter de rejoindre les positions françaises en mettant à profit son altitude. Il passe les lignes à moins de 200 m sous un tir nourri d'infanterie, et l'avion « se vomit »
au plus près des lignes françaises. Cet exploit lui vaudra d'être nommé sergent.
Le 12 mars 1915, l'unité passe sur Maurice-Farman (MF.80), et les pilotes doivent aller chercher les avions au Bourget. Le 2 avril, Madon décolle à destination de Belfort via Toul, où est basée l'escadrille n° 44. Pris dans la brume avec son Farman (immatriculé MF-361), il se pose en campagne près de Bar-le-Duc, d'où il repart le 5. De nouveau trompé par le brouillard, il dépasse Belfort et atterrit à Porrentruy (Suisse). Interné à Saint-Gall,
puis à Berne, l'équipage rejoint ensuite Hospenthal, où il retrouve le sergent pilote Martin et son mécanicien, qui se sont également posés en Suisse au retour d'une mission de bombardement.
Ayant réussi à s'évader le 27 décembre 1915, Madon regagne la France, où il ne reçoit pas un accueil des plus enthousiastes (à l'annonce de l'atterrissage en Suisse, le commandant de l'escadrille avait envisagé de traduire l'équipage en conseil de guerre!). Il reprend néanmoins sa place au front en février 1916, au moment où se prépare l'offensive sur Verdun.
Sa demande d'affectation dans la chasse ayant été acceptée, Madon est envoyé à l'école de pilotage de Pau, puis à l'école de tir de Cazaux et, le 1er septembre 1916, rejoint l'escadrille N.38 (qui deviendra par la suite la SPA.38). Entre le 20 septembre 1916 et le 4 septembre 1917, il remporte seize victoires officielles, plus dix-huit non homologuées. Nommé adjudant le 16 septembre 1916, il accède au grade de sous-lieutenant le 15 août
1917.

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Georges Madon et son mécanicien devant leur SPAD S-XIII de la SPA.38. Le 16 juillet 1918, l'as français abattit trois Pfalz sans tirer une seule cartouche, deux d'entre eux étant entrés en collision, le troisième ayant explosé en vol.
Madon procède aux essais d'un appareil expérimental dépourvu d'empennage arrière
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Le 17 mars précédent, alors qu'il en était à sa septième victoire, Madon, ayant engagé deux biplans allemands, abattit l'un d'entre eux avec quinze cartouches, mais, alors qu'il s'attaquait au second, son moteur se mit à tousser.
Étant à l'intérieur des lignes allemandes et ne pouvant regagner les tranchées françaises en vol plané, il décida d'atterrir chez l'ennemi pour réparer. Il posa donc son avion — peint aux trois couleurs (nez bleu, fuselage blanc, queue rouge) — dans un champ, et, ayant réparé, décolla, alors que les soldats allemands, alertés par un témoin, se précipitaient. Après les avoir mitraillés, Madon mit le cap sur les lignes françaises, qu'il regagna
sans encombre.
Le 24 octobre 1917, Madon abat son dix-septième appareil homologué (son pilote, Hans Villinger, avait volé en sa compagnie à Buc en 1913), et à la fin de l'année, il se classe, avec dix-huit victoires, au troisième rang des as français, derrière Nungesser (trente victoires) et Heurteaux (vingt et une) et à égalité avec Deullin et Fonck.

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SPAD S. XIICa C1 , Unité: inconnue , Serial: ? , Pilote - George Madon, un as de 40 victoires, 1917.
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Titulaire de la médaille militaire (23 novembre 1916) et chevalier de la Légion d'honneur (5 mai 1917), Madon passe lieutenant le 16 février 1918, avant de prendre le commandement de son escadrille le 24 mars. Le 27 mai, il abat quatre avions allemands en une seule sortie. L'état-major refusant de les homologuer (deux d'entre eux lui seront cependant accordés par la suite), il réitère son exploit le 1er juin, exploit reconnu officiellement
cette fois. Le 3 septembre, il remporte sa quarante et unième et dernière victoire reconnue.
Nommé capitaine le 11 novembre 1918 et fait officier de la Légion d'honneur le 25 novembre de la même année, Madon quitte le service actif le 5 octobre 1919. Néanmoins, après quatre ans de congé, il obtient d'être réintégré dans la vie militaire et, le 10 avril 1924, est affecté au 4e groupe d'aviation d'Afrique.
Madon est le seul « as des as » breveté avant le conflit qui ait fait la guerre de bout en bout, d'abord dans l'observation, puis dans la chasse, ce, en des temps où, du fait de la supériorité allemande, les équipages français subissaient des pertes terribles.
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