Alberto Santos Dumont
S'il ne fut pas le
premier à diriger un ballon ou à piloter un aéroplane,
AlbertoSantos-Dumont n'en figure pas moins parmi les pionniers de
l'aéronautique qui révélèrent au public
parisien la locomotion aérienne, et cette initiative lui
valut auprès de ce dernier une immense popularité.
Dernier né d'une famille de dix enfants, celui qui, par ses
excentricités et ses exploits, allait conquérir Paris
était le fils de l'ingénieur Henrique Dumont, lui-même
petit-fils d'un Français installé comme bijoutier
au Brésil. Alberto Santos-Dumont vit le jour le 20 juillet
1873, dans le district de Joào Aires (Etat du Minas Gerais),
avant de prendre le chemin de l'Etat de Sào Paulo où
ses parents possédaient et exploitaient une importante plantation
de café.
En 1890, le jeune
homme, passionné de mécanique, débarqua en
France, s'intéressa à l'automobile et acquit l'une
des premières voitures Peugeot. C'est cependant en mars 1898
qu'il reçut son baptême de l'air en effectuant une
ascension en ballon libre comme passager.
Séduit par les
aérostats, il commanda au constructeur Lachambre un ballon
de 113 m3, qu'il dénomma Le Brasil et qui était en
fait le plus petit engin de ce type au monde. Le Brésilien
passa ensuite à un dirigeable de 180 m3, qui, sous l'appellation
de dirigeable n° 1, s'éleva depuis le Jardin d'Acclimatation
jusqu'à l'altitude de 400 m, le 20 septembre 1898.

Bien que
l'aérostat ait été endommagé au cours
de la descente, Santos-Dumont, nullement découragé,
décida de poursuivre ses expériences et se fit construire,
dans le parc de l'Aéro-Club à Saint-Cloud, un hangar
d'une trentaine de mètres de long où il entreposaitses
engins.
C'est là qu'il procéda au gonflage de son dirigeable
n° 4, avec lequel il comptait prendre part au grand prix offert
par Deutsch de la Meurthe au premier aéronaute qui, parti
du parc d'aérostation de Longchamp, irait jusqu'à
la tour Eiffel etreviendrait à son point de départ
dans le temps d'une demi-heure.
Embarqué sur
son dirigeable n° 5, Santos-Dumont prit l'air le 12 juillet
1901, contourna la tour Eiffel mais heurta le toit d'un des grands
hôtels du Trocadéro, quai de Passy, sur le chemin du
retour. Sorti indemne de l'accident, il récidiva à
bord du numéro 6, le 19 octobre de la même année,
et enleva le grand prix de justesse.
Bénéficiant d'une
énorme popularité, lerichissime Brésilien continua
à dépenser sa fortune dans la mise au point de dirigeables
(il poursuivit ses travaux jusqu'au numéro 14 et fabriqua
même, en 1907, le numéro 16, une machine mixte dotée
de plans sustentateurs, puis le numéro 18, sur lequel on
sait peu de choses en raison du secret dont il entoura certaines
de ses expériences).
Il pressentait cependant l'avenir brillant
auquel semblait promis "aviation, grâce, en particulier,
aux progrès enregistrés dans le domaine des moteurs.
C'est ainsi qu'il prit connaissance des travaux des frères
Wright; pourtant, il aborda les « plus lourds que l'air»
par le biais des hélicoptères, en mettant au point
une voilure tournante birotor mut par un propulseur Antoinette de
24 ch.
Après des essais
décevants, séduit par les expériences menées
par Gabriel Voisin sur la Seine, le Brésilien résolut,
tout comme le pionnier français, de fabriquer un biplan cellulaire.
C'est de cette façon que naquit le XIV bis, un appareil canard
ont les ailes et le moteur étaient disposés à
l'arrière et sur lequel le pilote se tenait debout, dans
une nacelle d'osier récupérée sur le dirigeable
n° 14 (la poutre armée de celui-ci et son moteur avaient
été également adaptés sur le XIV bis).

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vol
du 14
bis
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Santos-Dumont se familiarisa alors avec les commandes de son aéroplane
en le faisant suspendre à un chariot-trolley installé
sur un câble incliné qui lui permettait d'effectuer
un parcours donné. L'appareil fut également suspendu
sous l'enveloppe du dirigeable n° 14, d'où sa désignation
de XIV bis. Grâce à sa machine volante, Alberto Santos-Dumont
réalisa un vol de 13 m, le 13 septembre 1906, au-dessus de
Bagatelle, puis un autre de 60 m, le 23 octobre suivant, à
l'altitude de 3 m.
Utilisant alors un moteur de 50 ch, il se présenta,
quelques jours plus tard (12 novembre), au départ du prix
de l'Aéro-Club de France récompensant le premier vol
supérieur à 100 m. Ce jour-là, le XIV bis parcourut
220 m en 21 s, à 6 m de hauteur, accomplissant le premier
vol complet réalisé en Europe sous contrôle
officiel.
On était loin
des envolées des Wright, mais Santos-Dumont pouvait néanmoins
s'enorgueillir d'avoir pris l'air sans le secours d'aucun moyen
de lancement. Le retentissement de cet exploit fut énorme
et contribua sans doute à l'essor de l'aéronautique
en France.
Après la déception éprouvée
avec le numéro 15, un biplan monté sur une roue à
« pneu-ballon », au début de 1907, le pionnier
mit au point le numéro 19 « Demoiselle », qui
devait asseoir sa popularité de manière définitive.
Vendue à un prix très raisonnable, qui permit à
des pilotes comme Roland Garros de débuter dans l'aviation,
la «Demoiselle» donna lieu à divers développements,
dont le numéro 19 bis et le numéro 20.
Santos-Dumont
n'ayant pas pris de brevet pour cet appareil, des industriels, tels
Clément-Bayard et Duthejl et Chalmers, furent libres de construire.
La carrière aéronautique du grand pionnier cessa à
la fin de la première décennie du XXè siècle,
à un moment où, devenue majeure, l'aviation commençait
à s'imposer.
Les dernières années de sa vie
furent marquées par la solitude et le désespoir. S'insurgeant
contre l'utilisation militaire de l'avion, Santos-Dumont, en proie
à une série de dépressions, se donna la mort
au Brésil (où il résidait le plus souvent)
le 23 juillet 1932.
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