- Introduction

 

- Histoire de l'Aviation

- Belles Photos Avions

- Les plus beaux avions

- Les profils

 

- Avions 14-18

- Attaques

- Chasseurs

- Ballons

- Bombardiers

- Hélicos

- Maritime

- Autres

- Planeurs

- Reco.Transp.Entrain.

- Spéciaux

 

- Avions 39-45

- Attaques

- Chasseurs

- Bombardiers

- Hélicos

- Maritime

- Autres

- Planeurs

- Reco.Transp.Entrain.

- Spéciaux

 

- Les Hommes

- As 14-18

- As 39-45

- Les Avionneurs

- Les Exploits

- Les Figures

 

- Divers

- Cocardes

- Décorations

- Emblèmes

- Grades

 

- Guerres mondiales

- Guerre 14-18

- Guerre 39-45

 

- Bataille d'Angleterre

- Une période décisive

- Les Avions

 

 

 

Constructeurs

Constructeurs d'avions

 


            

 

 

Tupolev

 

 

Nom : Andreï Tupolev

 

Né en : I0 septembre I888

 

A : Poustomasov (province de Tver)

 

Mort le : 23 décembre 1972

 

A : Moscou

  Andreï Tupolev


LE GÉANT SOVIÉTIQUE

Authentique pionnier de l'aviation soviétique, Andreï Tupolev a permis, avec l'avènement du réacteur, le développement d'une industrie diversifiée à la mesure de son pays

Commencée sous le régime tsariste, la carrière du plus populaire des avionneurs russes, Andreï Nikolaïevitch Tupolev (à prononcer Toupolev), se poursuivit jusqu'au début des années soixante-dix. Pendant cette très longue période d'activité, quelque soixante modèles d'avions ont porté son nom, ou plutôt ses sigles, à savoir ANT puis Tu.

Né le I0 septembre I888 dans le village de Poustomasov (province de Tver), où son père, notaire et mathématicien, avait été exilé pour activités révolutionnaires, Andreï Tupolev entra à vingt ans à l'École technique supérieure de Moscou (MTVU). Il y suivit les cours du professeur Joukovsky, dont il devint rapidement l'élève préféré, et se spécialisa dans l'aérodynamique, avant d'opter, en 1910, pour les techniques aéronautiques.

Avec des camarades il construisit quelques planeurs du type Chanute, qu'il n'hésitait pas à piloter lui-même. Soupçonné à son tour d'activités révolutionnaires, il fut expulsé du MTVU en 1911. Après s'être occupé un temps de l'agence Caudron, tout en suivant de près les réalisations aéronautiques russes, il put enfin terminer ses études, en 1914. Pendant la guerre, il acquit quelque expérience en travaillant à l'usine Douks, la plus importante entreprise d'aviation du pays avant la révolution de 1917 et l'une des rares qui survécut à la guerre civile.

De haut en bas : VANT-2, premier avion tout métal de Tupolev (il prit l'air en mai 1924);

l'ANT-3, qui fut le premier appareil de Tupolev à connaître la production de série;

l'hydravion bimoteur à hélices propulsives ANT-8, déjà périmé avant son premier vol;

le  cirque Vakhmistrov , un étonnant composite formé, ici, d'un bombardier TB-3 et de trois chasseurs  parasites  1-5, montés à force de bras sur la voiture.

Débuts difficiles

En I918, Joukovsky forma, avec Tupolev, le projet de centraliser la recherche aéronautique : ainsi naquit le TsAGI (Institut central aéro-et hydrodynamique), dont les trente-six membres furent placés sous la direction de Joukovsky. Parallèlement, une commission d'études était mise sur pied pour l'emploi du métal dans la construction aéronautique. Tupolev en faisait partie, tout comme Sidorine, Ozerov, Pogossky. Ce furent les techniciens de l'usine Kolchugine qui résolurent le problème en mettant au point une sorte de Duralumin russe baptisé « Kolchugalumin », ou métal KA, alliage léger composé de cuivre, de manganèse, de nickel et d'aluminium.

C'est en 1921, dans l'atelier exigu des membres du TsAGI, que Tupolev réalisa son premier avion l'ANT-1, monoplan monoplace de construction mixte, à moteur Blackburn Tomtit de I8 ch (2 cylindres), qui vola à I00 km/h avant d'être remotorisé avec un 8-cylindres en étoile Anzani de 45 ch. Mais, déjà, Tupolev pensait à l'ANT-2, qu'il étudia pour acquérir une certaine expérience dans l'emploi du Kolchugalumin.

Construit en I923, ce monoplan à aile haute entièrement métallique ne comportait aucune pièce tournée, l'atelier ne disposant ni d'outillage spécialisé ni de machines-outils. Pour installer l'aile de I0 m d'envergure, il fallut abattre une cloison. Doté d'un fuselage ventru accueillant deux passagers en cabine et d'un poste de pilotage à ciel ouvert, il était équipé d'un moteur Bristol Lucifer, un 3-cylindres en étoile de 100 ch. Son train se composait de deux jambes élastiques (les roues pouvaient être remplacées par des skis) et d'un patin de queue. Le revêtement était en tôle ondulée, technique typiquement allemande, mise au point par Junkers.

de haut en bas le bombardier Tupolev SB-2 (ANT-40), construit sous licence par Avia et mis en service en Tchécoslovaquie, fut le premier avion militaire soviétique produit sous licence hors d'U.R.S.S.

Tandis que l'ANT-2 effectuait ses essais, Tupolev conçut l'ANT-3, monomoteur sesquiplan de transport léger et premier avion tout métal produit en série en U.R.S.S.; il fut utilisé par les forces aériennes soviétiques sous la désignation R-3 pour la reconnaissance. Vu la pénurie de moteurs russes, Tupolev équipa les cent un R-3 produits (plus de deux cents selon certaines sources) de divers propulseurs : Liberty de 400 ch, M-5 (Liberty russe), Lorraine-Dietrich de 450 ch.

En 1926, un R-3 modifié doté d'un Napier Lion de 450 ch parcourut en 34 h 15 mn de vol effectif (réparties sur trois jours) un circuit de 7 510 km (Moscou - Koenigsberg - Berlin - Paris - Rome - Vienne - Varsovie - Moscou), à la moyenne de 190 km/h. L'année suivante, un R-3 de série, avec capacité de carburant accrue, se rendit de Moscou au Japon via la Sibérie, parcourant 11 000 km en onze étapes sur douze jours. Enfin, en 1929, un R-3 fut équipé d'un moteur BMW-VI de 550 ch (futur M-17 russe) et redésigné R-4.

Le premier bombardier

Le premier gros porteur de Tupolev fut l'ANT-4, un bombardier bimoteur en Kolchugalumin fortement inspiré du Junkers G-23 (dont un exemplaire fut monté à Moscou en 1924) et de son dérivé militaire le K-30 (testé en U.R.S.S. au cours de l'hiver 1925-1926). Petlyakov avait assuré le développement du prototype, qui décolla le 26 novembre 1925 de l'aérodrome central de Moscou, où il avait été assemblé. C'est un ANT-4 qui, du 23 août au ler novembre 1929, relia pour la première fois l'Europe à l'Amérique dans le sens ouest-est, couvrant 19 840 km en vingt-trois étapes, avec deux changements de moteurs et d'atterrisseurs (roues, flotteurs, puis retour aux roues).

Les quelque deux cents ANT-4 construits entre 1928 et 1931 constituèrent le fer de lance des forces aériennes soviétiques pendant dix ans et servirent jusqu'aux premiers combats de la Seconde Guerre mondiale sous les désignations TB-1, TB-IP (avec flotteurs) et PS-1 (transport civil, surtout utilisé dans les régions polaires).

Bon nombre d'ANT-4 furent employés dans le Grand Nord, et un exemplaire servit également de « porteavions » à deux chasseurs « parasites » dans le cadre des expériences de Vakhmistrov. Les TB-1 étaient armés de trois mitrailleuses orientables, mais quelquesuns reçurent des canons à titre expérimental. En 1941, la plupart d'entre eux étaient encore affectés au transport et, parfois, au largage de parachutistes.

L'ANT-7, ou R-6, fut étudié pendant les essais de l'ANT-4, dont il était extrapolé. Plus petit, propulsé par deux moteurs M-17, il était défendu par quatre mitrailleuses mobiles. Apparu en 1929, ce modèle, dont il exista une version à flotteurs (R-6P), resta en service aussi longtemps que le TB-1.

Le grand frère quadrimoteur

L'Europe découvrit l'ANT-6 quand trois exemplaires de ce gros quadrimoteur se posèrent au Bourget en 1934. Doté de quatre M-17 et d'un train d'atterrissage fixe, il avait été conçu en 1930 sous la direction de Tupolev et de Petlyakov, et fut construit à plusieurs milliers d'exemplaires qui étaient encore en service en 1941.

La version bombardier (TB-3), qui emportait huit hommes d'équipage à 200 km/h, était défendue par quatre mitrailleuses (une dans le nez, deux sur le dos et une sous le fuselage), sa charge offensive étant constituée de 1 à 3 t de bombes. La variante de transport (G-2), quant à elle, était conçue pour emporter 3 t de fret ou trente parachutistes.

La lenteur des TB-3 les rendant très vulnérables, Tupolev décida d'en améliorer l'aérodynamique. Remotorisée avec des AM-34 de 830 ch, dotée d'un !0_ train redessiné (chaque jambe comportait soit une roue de grand diamètre, soit deux roues plus petites) et ayant reçu un poste de mitrailleur supplémentaire en queue, la nouvelle version, parfois designée TB-5, atteignait 250 km/h.

Quelques ANT-6 furent affectés aux expéditions polaires, et, en 1936, un TB-6 enleva plusieurs records internationaux : 8 116 m d'altitude avec 5 t de charge (11 septembre); 6 605 m avec 10 t (16 septembre); 2 000 m avec 12 t (20 septembre); 8 980 m avec 5 t (28 octobre). Les chaînes s'arrêtèrent en 1938, après la sortie d'une nouvelle version (quatre AM-34RN de 1 250 ch).

une vue du Salon de Paris de 1936, avec le bimoteur de transport ANT-35 pour dix passagers et l'avion de record ANT-25 surplombant le stand

Premier chasseur

Tandis que Petlyakov s'occupait des programmes TB-1 et R-6, Sukhoi travaillait au I-4, alias ANT-5, un chasseur monoplace sesquiplan dont le premier prototype décolla le 10 août 1928 avec un moteur GnomeRhône Jupiter de 420 ch. Produit à 370 exemplaires (moteur M-22 : Jupiter soviétique) entre 1928 et 1933, il atteignait 231 km/h à 3 000 m. En 1931, apparut le I-4 bis, monoplan parasol volant à 268 km/h au niveau de la mer.

Un exemplaire fut transformé à titre expérimental en hydravion; un autre reçut deux canons sans recul DRP de 16 mm sous l'aile haute; un troisième fut armé pour essais de plusieurs mitrailleuses de voilure.

Ce furent encore des 1-4 que Vakhmistrov monta en 1931 sur l'aile d'un TB-1. Ce composite ayant donné satisfaction, les essais se poursuivirent avec divers types d'avions porteurs et de « parasites ».

Comme tous les avions Tupolev de l'époque, l'hydravion ANT-8 (MDR-2) était entièrement métallique. Ses deux moteurs M-17 étaient supportés par des bâtis montés sur la section centrale de l'aile haute. S'il pouvait tenir l'air pendant cinq heures, il n'était guère maniable et sa vitesse d'amerrissage était trop élevée. L'ANT-8 resta donc au stade d'exemplaire unique, et le programme fut abandonné, tout comme celui de l'ANT-11 (1929), autre hydravion à coque.

Quand il mit à l'étude le trimoteur commercial ANT-9 fin 1928, Tupolev promit de présenter le premier exemplaire à la parade du ler mai suivant. Le jour dit, l'appareil était exposé sur la place Rouge à Moscou : il avait été construit en dix-huit semaines et terminé seulement deux jours auparavant.

Il s'agissait d'un monoplan à aile haute devant opérer sur les lignes intérieures russes avec la compagnie Dobrolet. En 1930, la Deruluft allemande s'en équipait également, certains exemplaires étant dotés de moteurs Wright Whirlwind de 365 ch, alors que les ANT-9 (PS-9) soviétiques possédaient des M-26 de 300 ch (des Gnome-Rhône Titan K-7 pour les premiers exemplaires).

En 1932, sortait une version bimoteur (ANT-9) équipée de deux M-17, un carénage nasal remplaçant le moteur supprimé. Un an plus tard, deux exemplaires de ce modèle participèrent à une tournée de propagande, l'un d'eux portant un nez très pointu décoré d'une gueule de crocodile. L'ANT-9 resta en production pendant quatre ans (1930-1934) et effectua quelques raids remarqués : c'est ainsi qu'en 1929 un appareil de ce type couvrit 9 037 km (Moscou - Berlin - Paris - Rome - Marseille - Londres - Paris - Berlin - Varsovie - Moscou) en 53 heures à la moyenne de 170,500 km/h.

le Tu-14, premier avion à réaction de Tupolev produit en série, était propulsé par deux Rolls-Royce Nene construits par Kouznetsov (photo Flight). Ci-dessous l'élégant Tu-16, premier bombardier lourd à aile en flèche mis en service en Union soviétique

Les géants de Tupolev

C'est dans les années trente également que Tupolev conçut les avions « géants » qui devaient contribuer pour une large part à sa célébrité. Tous étaient dérivés les uns des autres. Ainsi l'ANT-6 était-il un ANT-4 agrandi; les ANT-8 et 9 incorporaient des éléments de l'ANT-7, lui-même un ANT-4 plus petit. De son côté, l'ANT-14 reprenait des caractéristiques des ANT-6 et 9.

Ce transport lourd entièrement métallique, destiné à la ligne Moscou-Vladivostok, vola pour la première fois le 14 août 1931. Il était propulsé par cinq moteurs M-22 (dont quatre implantés dans le bord d'attaque de l'aile haute, le cinquième coiffant le nez) et possédait un train fixe, avec deux roues par jambe (une seule par la suite). La cabine pouvait accueillir trente-six passagers, plus six hommes d'équipage. (L'ANT-14 est également connu sous la désignation de Pravda.)

L'ANT-6 servit de base à toute une série d'études concernant des gros porteurs, dont trois seulement se concrétisèrent : les ANT-16, 20 et 20 bis. Apparu en 1933, l'ANT-16 découlait du TB-3, mais portait, sur la section centrale de l'aile haute, deux moteurs AM-34R supplémentaires disposés en tandem sur un bâti. Désigné TB-4, il était défendu par douze mitrailleuses et pouvait transporter 12 t de charge utile (contre 5 t pour le TB-3) à la vitesse maximale de 200 km/h.

C'est en 1932 que, pour célébrer l'anniversaire des débuts littéraires de Maxime Gorki, la société de presse Jurgaz ouvrit une souscription publique pour la construction d'un avion géant et la formation d'une escadrille de propagande portant le nom de l'illustre écrivain. Six millions de roubles furent ainsi recueillis, et, en mars 1933, Tupolev et les ingénieurs du TsAGI mettaient en chantier l'ANT-20.

Dérivé direct de l'ANT-16, l'appareil était si grand que son montage dut s'effectuer par tronçons à l'aérodrome central de Moscou. L'ANT-20 était un monoplan aile haute de 63 m d'envergure et 32,48 m de longueur propulsé par huit moteurs AM-34R de 900 ch, dont deux montés en tandem sur le fuselage.

Il vola pour la première fois le 19 mai 1934. Véritable centrale de propagande volante, il avait à son bord une imprimerie permettant de tirer de 10 000 à 12 000 tracts à l'heure, ou de composer un petit journal; un système optique projetait des images sur les nuages ou sur des écrans de fumée; une rampe d'ampoules alaire diffusait un journal lumineux; un laboratoire photographique était intégré dans l'épaisseur de l'aile droite; à l'arrière du fuselage, une cabine était réservée à la projection de films.

l'élégant TU16 premier bombardier lourd a aile en flèche mis en service en union soviétique

Les aménagements internes comprenaient des bureaux pour dactylos, une cuisine, un magasin, une pharmacie, une blanchisserie, des lavabos, des vestiaires, des soutes à bagages et des cabines confortables, le tout chauffé et éclairé. Au total, soixante-seize personnes (dont une vingtaine d'hommes d'équipage) pouvaient prendre place à son bord.

Baptisé Maxime Gorki, l'ANT-20 était à l'époque le plus gros avion du monde, et l'impact publicitaire fut énorme. Mais l'imposant oiseau fut détruit le 18 mai 1935 pendant un vol de démonstration (la veille, Saint-Exupéry avait pris l'air à son bord) lors d'une acrobatie, l'un des chasseurs d'accompagnement percuta le géant, qui s'écrasa au sol, tuant quarante-neuf personnes. L'accident fut ressenti comme une véritable catastrophe nationale. Le gouvernement voulut immédiatement faire construire sept nouveaux ANT-20 (dont quatre financés par une nouvelle souscription publique), mais le projet n'aboutit pas.

De même, les projets ANT-26 et 28, bombardier et transport géants prévus avec douze moteurs, n'eurent pas de suite. L'ANT-26 aurait pesé 70 t au décollage, contre 42 t pour l'ANT-20. Ce dernier donna naissance à seize ANT-20 bis, qui se différenciaient du Maxime Gorki essentiellement par leurs six moteurs M-100 de 1 100 ch (Hispano-Suiza 12 Y soviétiques) montés sur le bord d'attaque de l'aile. Apparus en 1935, les ANT-20 bis n'entrèrent en service qu'en 1940; ils emportaient huit hommes d'équipage et soixantequatre passagers en cabine (fauteuils) et dans l'épaisseur de l'aile (couchettes).

Autre géant de Tupolev, l'ANT-22, ou MK-1 (Cuirassé marin n° 1), était un hydravion à deux coques en catamaran d'une envergure de 51 m pour une longueur de 24,10 m. Chaque coque comportait trois postes de tir (nez, dos, queue) et l'équipage se composait de huit à dix hommes. Étudié en 1931, l'ANT-22 vola en 1935 avec six moteurs disposés en tandem en trois fuseaux surplombant la section centrale de l'aile haute.

Malgré un bon comportement en vol et sur mer (les redans furent modifiés en cours d'essais), sa vitesse maximale (230 km/h) fut jugée insuffisante, et l'avion resta unique. Le 8 décembre 1936, il battit le record d'altitude de sa catégorie en emportant 10 t de charge à 1 912 m.

Après l'ANT-25, conçu en 1932 en vue de battre le record du monde de distance (v. Sukhoi ), Tupolev étudia en 1934 un nouvel hydravion, l'ANT-27, entièrement métallique. Doté d'une coque à deux redans et d'une aile haute supportant trois moteurs AM-34 sur bâtis (un propulsif, deux tractifs), il était défendu par trois mitrailleuses (nez, dos, queue). Peu connu, cet hydravion fut désigné MDR-4 pour la reconnaissance et MTB-1 pour le bombardement.

Retour aux chasseurs

Tupolev ne fit que de rares incursions dans le domaine des chasseurs. En 1930, toutefois, le TsAGI développa l'ANT-17, un biplan quadriplace à train fixe, propulsé par deux moteurs AM-34. Conçu pour l'attaque au sol, il possédait un blindage lourd, pesant 1 000 kg à lui tout seul, et son armement comprenait deux canons et six mitrailleuses. Il ne fut pas suivi, mais servit de base au TsKB (Bureau central de construction) pour la réalisation des premiers avions d'assaut.

Vint ensuite l'ANT-23 (ou 1-12), un bimoteur bipoutre armé de deux canons sans recul de fort calibre. La nacelle centrale comportait un moteur Bristol Jupiter VI à l'avant, le poste de pilotage au milieu et un autre Jupiter VI propulsif à l'arrière. Les essais, effectués au cours de l'été 1933, ayant été catastrophiques, le projet fut abandonné. Un an plus tard apparaissait l'ANT-29, un chasseur-canon également bimoteur mais d'aspect plus conventionnel qui vola avec deux moteurs M-100; deux canons sans recul étaient logés dans la partie basse du fuselage. Les caractéristiques de vol n'ayant pas donné satisfaction, le programme fut annulé en 1936.

Pendant le développement des ANT-23 et 29, Sukhoi conçut le petit ANT-31, concurrent du fameux TsKB-3 de Polikarpov (futur I-15). C'était un monoplan à aile basse et à train rétractable, dont l'habitacle était fermé par une verrière coulissante. II était motorisé avec un Mercury/M-25 de 712 ch qui, malgré sa puissance, ne parvint pas à lui assurer des performances intéressantes. Désigné I-14, le petit monoplan de chasse était par ailleurs très instable, trop lourd et de pilotage difficile. Malgré la construction, en 1933, d'un second prototype (1-14 bis), équipé d'un moteur M-63 de 1 000 ch, les défauts subsistèrent et Polikarpov remporta la décision. Le 1-14 fut néanmoins produit à dix-huit exemplaires.

Enfin, Arkhangelsky, un des tout premiers collaborateurs de Tupolev, construisit un chasseur lourd issu de la lignée des ANT-4 : l'ANT-21, auquel un revêtement de toile tendu sur la tôle ondulée assurait une meilleure pénétration aérodynamique.

Ses deux moteurs M-17 lui permettaient de dépasser 350 km/h, vitesse qui fut fatale au premier prototype, dont la queue bidérive se rompit en vol à la suite d'importantes vibrations. Le second exemplaire, qui avait reçu un empennage classique, termina sa courte carrière à l'Institut de recherche des forces aériennes soviétiques, utilisé pour l'étude des effets aérodynamiques à grande vitesse.

C'est à Arkhangelsky que l'on doit encore l'ANT-35, certainement le plus beau des bimoteurs de transport civil soviétiques de son temps. Très fin de lignes, avec une aile basse, deux moteurs Gnome-Rhône 14 N/M-85 de 850 ch, un atterrisseur escamotable, l'ANT-35 (ou PS-35, parfois TsAGI-35) fut confronté à trois autres concurrents (STAL-7 de Bartini, aile volante de Beliaev, ZIG-1 du Français Laville), dont il finit par triompher. Exposé en 1936 au XVQ Salon de Paris, il fut mis en production l'année suivante. L'ANT-35 pouvait transporter dix à douze personnes à 360 km/h en croisière (432 km/h au maximum).

Le bombardier rapide

En 1934, au TsAGI, la brigade Arkhangelsky développa le bimoteur de bombardement rapide ANT-39, basé sur le chasseur-canon ANT-29. Son fuselage monocoque et son revêtement lisse travaillant représentaient de véritables innovations en U.R.S.S. à l'époque. Ce prototype, auquel d'aucuns ont attribué une nombreuse descendance sous les désignations SB-1 et MI-13, vola avec deux moteurs M-25 de 750 ch et des capots en forme de radiateur d'auto. Une tourelle de nez et un poste de tir dorsal assuraient sa défense. Bien que prometteur, le prototype se montra sous-motorisé, son autonomie et sa capacité d'emport (500 kg) étant par ailleurs insuffisantes, il fut décidé de construire un second prototype. Redésigné ANT-40, celui-ci vola en 1936 et fut produit en série jusqu'en 1941.

La version de base (SB-2), testée en Espagne pendant la guerre civile, fut engagée en Chine en 1937 et contre les Finlandais durant la « guerre d'hiver » (1939-1940). Elle était caractérisée par son train escamotable (roues ou skis), sa fenêtre ventrale, s'ajoutant aux deux autres postes de tir, et ses moteurs M-100 de 750-830 ch. Ce modèle fut également produit en Tchécoslovaquie en 1937 et 1938 (B-71).

Vint ensuite une variante à moteurs M-100 A-AU donnant 860 ch à 3 300 m, dont fut extrapolé un transport à nez non vitré (PS-40). Le SB-2 bis qui suivit possédait deux moteurs M-103 (960 ch à 4 000 m) et des capotages plus ajustés (certains avec une tourelle dorsale et une cuvette ventrale); il fut utilisé par l'armée de l'air chinoise. La version d'entraînement (SB-3), dotée d'un nez rallongé et d'un poste de pilotage supplémentaire à ciel ouvert, fut souvent affectée au remorquage de planeurs Antonov A-7 pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le SB-RK, ou Ar-2, fut le dernier représentant de la lignée. Ce bombardier en piqué équipé d'aérofreins du type « volets vénitiens » en intrados, emportait deux réservoirs externes largables; ses moteurs étaient des M-105R (fournissant 1 050 ch à 4000 m) avec des capots très ajustés.

Les bombardiers rapides SB furent de tous les conflits jusqu'aux premiers combats contre les nazis. Bon nombre d'entre eux reçurent des caméras AFA-B pour la reconnaissance.

Les bombardiers lourds

Dernier développement de la famille ANT-6, l'ANT-41 fut conçu par l'équipe de Bolkhovitinov. 11 s'agissait d'un quadrimoteur de transport lourd à aile médiane, dont le train s'escamotait à demi dans de très larges pantalons. II était propulsé par des AM-34RNB suralimentés de 860 ch. La version de bombardement (TB-6), peu construite, était défendue par plusieurs tourelles (nez, dos, queue) et transportait 3 t de bombes à 380 km/h au maximum. Pour la reconnaissance, le TB-6 était équipé de caméras. Son équipage était de huit hommes.

C'est à partir du TB-6 que Petlyakov conçut, en 1936, l'ANT-42 (TB-7), le plus gros bombardier que les Soviétiques aient opposé aux Allemands en 1941. Il s'agissait d'un quadrimoteur à train escamotable, défendu par quatre mitrailleuses (une tourelle ornait la partie caudale de chaque fuseau-moteur interne) et présenté en plusieurs versions successives : moteurs M-105 de 1 100 ch, AM-35A de 1 350 ch, diesels M-40F de 1 500 ch (1943), enfin, M-82 (Ach-82) de 1 700 ch. Construits en série assez limitée, les TB-7, redésignés Pe-8 en 1940, furent utilisés pour le bombardement (5 t de charge), la reconnaissance et le transport (trente hommes équipés).

Avant la réforme du système de désignation, le TsAGI avait encore étudié l'ANT-44, un hydravion lourd de patrouille et de bombardement maritime de la classe du Short « Sunderland » anglais. Désigné MTB-2 en service, il était propulsé par quatre moteurs M-87 suralimentés par un AM-34 (comme le TB-6). Son armement comprenait deux tourelles mobiles, l'une dans le nez, l'autre dans la queue. Une version amphibie fut développée sous la désignation ANT-44D, ou TsAGI-44D.

Dernier appareil conçu par Sukhoi au sein du département Tupolev, l'ANT-51 (ou RD-DB-1, ou S3-3), de 1936 était un avion de bombardement léger rapproché et de reconnaissance rapide réalisé dans le cadre du programme « Ivanov ». Monoplan à aile médiane, équipé d'un moteur M-87B et d'un train escamotable, il vola en août 1937, mais ne donna pas satisfaction. La formule fut reprise en 1940 avec le BB-1, ou Su-2.

Le quadriturbopropulseur Tu-126 type AWACS (Airborne Warning and Control System), extrapolation directe du Tu-114 civil, lui-même dérivé du Tu-20, est utilisé pour la détection d'appareils opérant à basse altitude et le guidage de tir de missiles d'interception

L'arrestation de Tupolev

En 1937, Tupolev était arrivé au faîte des honneurs. Vice-président de la Direction principale de l'industrie aéronautique, il était décoré des ordres de Lénine, du Drapeau rouge, de l'Étoile rouge, de l'Emblème d'honneur, et se voyait gratifié de l'amitié de Staline et de Vorochilov. Son ami et collaborateur Kalinine ayant été victime des purges staliniennes, Tupolev intercéda en sa faveur et se retrouva lui-même poursuivi pour trahison (le NKVD l'accusait d'avoir fourni aux Allemands des plans qui leur avaient permis de construire le Bf-110) et fut condamné à mort.

Sa peine ayant été commuée en emprisonnement à vie, il fut incarcéré, avec bon nombre de ses collègues, à la prison spéciale Boutyrki à Moscou (les détenus avaient surnommé « charaga » le bureau-prison spécial auquel ils étaient affectés), où il occupait la cellule commune n° 58 du TsKB-39 (Bureau central de construction 39).

Le danger de guerre se précisant, les autorités soviétiques décidèrent d'accélérer la production aéronautique et en 1938 lancèrent de nouveaux programmes qualifiés d'« urgents ». Tupolev, qui s'était vu confier la direction de l'équipe d'études KB-103, fut chargé de définir dans les plus brefs délais un nouveau type de bombardier rapide. Ce fut l'ANT-58, ou Samolet 103 (futur Tu-2), qui resta en production de 1943 à 1948.

Les travaux ayant démarré en 1938, le premier prototype vola en janvier 1941 avec deux moteurs AM-37 de 1 400 ch. L'appareil, un monoplan à aile médiane doté d'un train escamotable et d'un empennage bidérive, se révéla d'emblée comme une grande réussite et valut à son créateur d'être remis en liberté et de recevoir le Prix Staline d'une valeur de 100 000 roubles, en 1943 (deux ans plus tard, il était nommé Héros du travail socialiste).

Les Tu-2

Suivirent l'ANT-59 (Samolet 103U), caractérisé par ses fuseaux-moteurs rallongés, ses dérives plus grandes et ses trois postes de tir (habitacle, dos, ventre), et l'ANT-60 (Samolet 103V), qui différait du précédent par ses deux moteurs en étoile M-82 fournissant 1 480 ch au décollage (les AM-37 n'avaient pas donné satisfaction).

Les premiers Tu-2 de présérie, identiques au troisième prototype, excepté les dérives encore agrandies, furent évalués en opérations dès le mois de septembre 1942, mais la version de série, désignée Tu-2S (structure revue et moteurs M-82FN de 1 850 ch), n'entra en service qu'au début de 1944. L'appareil pouvait transporter de 1 à 3 t de bombes à la vitesse maximale de 547 km/h. Son armement se composait de deux canons de 20 mm, montés à l'emplanture des ailes et de trois mitrailleuses de 12,7 mm (une dans chaque poste de tir).

Tandis que le Tu-2 se trouvait sur les chaînes (1 111 exemplaires en furent construits avant la fin du conflit), Tupolev conçut l'ANT-62, un dérivé de plus grande envergure, qui donna naissance aux versions Tu-2D à long rayon d'action, Tu-2T de torpillage (trois torpilles de 981 kg) et Tu-2R de reconnaissance (caméras oblique et verticale, et réservoir supplémentaire en soute). Le nez de ces appareils était plus long et plus angulaire.

En cours de production apparurent les variantes Tu-2Sh (nez plein avec canon de 57 mm du côté gauche) et UTB-2 (entraînement). En outre, plusieurs prototypes volèrent après la guerre : ainsi l'ANT-64 (moteurs AM-42 de 2000 ch); l'ANT-65 (AM-44T turbocompressés de 2 200 ch) et l'ANT-67 (diesels ACh-30BF de 1 800 ch) développés tous deux en 1946; l'ANT-68 (deux AM-39FNV) sorti en 1945, l'ANT-69, un Tu-2S modifié, doté d'une aile redessinée. Quelques projets n'aboutirent pas, dont l'ANT-74 (deux moteurs expérimentaux M-93, ou deux ACh-84TK plus un turboréacteur RD-45) et l'ANT-76, un Tu-2 de dimensions plus importantes.

La production du Tu-2 cessa en 1948. L'appareil équipa la plupart des pays satellites de l'U.R.S.S, principalement la Pologne et la Hongrie. La Chine communiste en reçut quelque trois cents exemplaires, dont un grand nombre furent engagés pendant la guerre de Corée. Certains Tu-2 modifiés servirent également de bancs d'essai volants (train d'atterrissage tricycle escamotable, turboréacteurs), dont le Tu-12 (alias ANT-77), une variante à deux turboréacteurs qui vola pour la première fois le 27 juillet 1947.

Tupolev développa également l'ANT-63SDB pour le bombardement à long rayon d'action, et le 63P, variante d'interception à nez plein armée de deux canons de 23 mm; parfois désignés Tu-1, ils restèrent au stade du prototype (moteurs AM-39, vitesse maximale de 680 km/h).

EN HAUT : le Tupolev Tu-16  Badger-F , biréacteur de reconnaissance à long rayon d'action doté de conteneurs électroniques sous voilure. Ce type d'appareil équipe actuellement en grand nombre les forces navales soviétiques. Selon les versions, le Badger peut être armé d'engins antinavires Kennel ou de missiles supersoniques Kipper. Cette photographie a été prise, lors d'un vol de patrouille, par un Nimrod de la RAF

En bas : un Tu-104A de Ceskoslovenske Aerolinie; développé à partir du Tu-16 de bombardement, ce biréacteur civil effectua son premier vol en 1956. Malgré de bonnes performances, il se révéla coûteux et mai adapté au transport aérien

Les « B-29 soviétiques »

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Soviétiques sollicitèrent en vain de leurs alliés anglais et américains la livraison d'un modèle de bombardier lourd, type d'appareil qui leur faisait totalement défaut (le Pe-8, d'ailleurs périmé, n'avait jamais enthousiasmé ses équipages!). Or, en 1944, trois Boeing B-29 « Superfortress » (les bombardiers les plus sophistiqués de l'époque), de retour d'une mission sur le Japon, furent contraints de se poser, à court d'essence, à Vladivostok.

Si les autorités soviétiques libérèrent leurs équipages, elles s'empressèrent de saisir les avions. Car, si les efforts de guerre n'avaient pas permis d'étudier un bombardier stratégique moderne, ce retard pouvait être rapidement comblé en copiant purement et simplement le B-29. Ce que fit Tupolev en un temps remarquablement court, compte tenu des difficultés techniques que comportait une telle réalisation (moteurs, hélices, tourelles télécommandées, etc.).

Un an plus tard, en effet, volait le Tu-4 (« Bull » dans le code OTAN). Extérieurement, il ne se différenciait du B-29 que par la présence d'un mât d'antenne sous l'arrière du fuselage, côté gauche. Les moteurs Wright R-3350 étaient remplacés par des ACh-73TK de 2 200 ch, les tourelles étaient présentes.

Construit à plusieurs centaines d'exemplaires, le Tu-4 donna naissance à toute une famille de dérivés militaires et civils. Le Tu-80, doté d'un nez allongé, d'un poste de pilotage provoquant un décrochement, d'une aile à structure modifiée et d'un empennage agrandi, resta à l'état de prototype; ce fut également le cas du Tu-70 (« Cart » pour l'OTAN), un avion de transport civil pour quarante-huit passagers et sept hommes d'équipage, au fuselage allongé de 6 m.

Le Tu-75, conçu en 1950 pour emporter une centaine d'hommes armés (ou un peu moins de parachutistes), vola à Touchino en 1951, mais ne fut pas davantage produit en série. C'est au cours de cette même année qu'apparut le Tu-85, ultime développement du Tu-4 de base, étudié pour le bombardement à très long rayon d'action (intercontinental) et baptisé « Barge » par l'OTAN.

Bien que de dimensions plus réduites, il présentait une capacité d'emport proche de celle du plus grand bombardier américain, le B-36. Les moteurs Dobrynine VD-4K à 24 cylindres de 4 300 ch lui donnaient une vitesse de 545 km/h à 10 000 m au poids de 107 t, avec seize hommes à bord. Il n'eut pas de suite.

 


Constructeurs

Fan d'avions © 16 Mai, 2001